
L’amour (al-maḥabba) est ce feu secret qui consume le cœur du serviteur jusqu’à ce qu’il ne reste rien d’autre que le Bien-Aimé (al-Maḥbūb). Il est l’attachement profond, le lien intime par lequel le cœur se donne entièrement à Allah, et se détourne de tout ce qui n’est pas Lui. C’est une extinction dans la Présence (fanā’ fī al-ḥuḍūr) et une plénitude dans le désir ardent (ʿishq) pour le Seigneur des mondes.
Lorsque l’amour d’Allah descend dans le cœur, il y descend comme une lumière, mais aussi comme un feu. Il éclaire le chemin de la proximité (qurb), et il brûle les attaches aux mondes créés. Celui en qui cette lumière s’est manifestée devient satisfait d’Allah (raḍiya biLlāh), et satisfait de tout ce qu’Allah décrète. Il atteint un état de contentement perpétuel (riḍā), même dans les épreuves, même dans la privation.
L’amour ardent (al-maḥabba al-ʿashīqa) est une passion qui fait du serviteur un amant absorbé, un épris sans retour, un être qui ne vit plus que pour contempler les traces du Bien-Aimé. Ce qu’il aime en vérité, ce n’est ni les dons divins ni la douceur des états spirituels, mais le Donneur, le Maître, Celui qui Se cache dans les beautés de la création et Se révèle dans les replis du cœur.
Dans cet amour, la félicité ne dépend plus des circonstances, mais du simple fait d’être avec Lui, de Le nommer, de Le sentir dans le secret du cœur. S’il devait être frappé par le plus grand des désastres, cela lui serait plus doux que tous les plaisirs, tant que ce désastre provient de la Main de son Bien-Aimé. Car ce n’est pas la douleur qui l’afflige, mais l’éloignement. Et ce n’est pas le plaisir qu’il recherche, mais la Présence.
C’est pourquoi les amants d’Allah sont silencieux, patients, sereins. Leur regard est fixé au-delà du visible, leur joie ne dépend pas du monde. Ils marchent sur les chemins de l’amour avec la paix dans la poitrine, la brûlure dans le cœur, et la lumière sur le visage. Leur invocation n’a pas d’autre but que Lui, et leur amour n’a pas d’autre issue que la rencontre.